Elle naît à Tirlemont (Tinen) aux environs de l’année 1200. Il n’y a pas de consensus sur l’origine sociale de ses parents, mais l’hypothèse proposée par Roger De Ganck, qui a le plus écrit sur Béatrice, les présente issus de la classe moyenne. Béatrice est la plus jeune de six enfants. Elle reçoit sa première éducation de sa mère, qui hélas meurt lorsqu’elle n’a que sept ans. Elle est de ce fait envoyée par son père dans la proche ville de Zoutleeuw (Léau) pour vivre avec un groupe de béguines. On ne connaît pas grande chose de cette période si ce n’est que ce séjour fut très riche d’affection réciproque. C’est du fait de cette « enfance béguinale » que Béatrice, quoique moniale, trouve place dans cette gallérie de portraits.
Revenue à la maison, elle manifeste à l’exemple de ses trois sœurs aînées le désir d’une vie monastique et de ce fait est transférée à l’âge de 10 ans dans le monastère cistercien de Florival (ou Bloemendael) comme oblate. A 15 ans elle est novice (bien qu’on n’envisageait en général cela qu’à partir de 18 ans). En avril 1216, elle fait sa profession et elle passe sa vie entière de moniale au sein de la communauté cistercienne en devenant en 1237 l’abbesse du monastère de Nazareth, fondé l’année précédente par son père. Elle y restera jusqu’à sa mort, advenue le 29 aout 1268.
Béatrice est intellectuellement brillante, dotée de sens artistique et d’une mémoire exceptionnelle, appliquée dans les études, connaissant le latin et familiarisée avec les traités théologiques (depuis Augustin jusqu’ à ses jours). Juste après sa profession monastique elle sera envoyée au couvent de la Ramée pour y apprendre l’art de l’écriture et de l’enluminure, afin d’écrire et illustrer les livres nécessaires à son église. Mais c’est à Nazareth, aux portes de Lierre dans l’abbaye de Notre-Dame, où elle avait été envoyée, qu’elle écrit son expérience mystique dans Les sept degrés de l’amour sacré ( Seuen manieren van Heilige ), publiée en 1926. Dans cette œuvre, rédigée dans le dialecte du Brabant, Béatrice relate son expérience de Dieu en traçant un parcours qui résume la forme la plus élevée, par l’amour, d’union entre Dieu et la créature. Les sept « manières », comme autant de marches, constituent un chemin unitaire de l’âme, laquelle, en éprouvant l’expérience d’amour, comprend au même temps qu’elle peut se réaliser pour l’homme uniquement si on reconnaît qu’elle provient de Dieu et à Lui elle s’oriente.
Fin 1267, elle tombe gravement malade, au point que le 29 août 1268 elle reçoit l’extrême onction et meurt après avoir communié. Elle est enterrée à Nazareth. C’est probablement sa communauté qui commissionne la Vita Beatricis , rédigée semblerati-il par Guillaume d’Afflighem en 1297, bien qu’on parle d’auteur anonyme. Elle a le titre de bienheureuse et son jour de commémoration est le 29 juillet. Une brève histoire d’elle se retrouve également dans Lilia, écrite par le même Henriquez qui relate la vie de Ida de Nivelles.
C’est à Béatrice que l’on doit l’expression « agir sans pourquoi » qu’utilise Maitre Eckart et qui sera plus tard reprise aussi par Jacopone da Todi et par Ste Cathérine de Gênes : aimer Dieu sans pourquoi.
Dépeinte par Gaspard de Crayer au 17e siècle comme une jolie jeune vierge respirant la santé, elle s’était tant «mortifiée», qu’elle était devenue une épave, car « elle se livra, surtout dans les débuts de sa vie religieuse, à des pénitences extraordinaires » (Paul De Jaegher, p.43)
Sources: Paul De Jaegher, p.43)S.J., Anthologie mystique, Desclée De Brouwer, Paris, 1933,
Franco Paris e Elena Tealdi, I sette modi di amare Dio. Vita di Beatrice, edizioni Paoline,2016
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